L’avis d’un médecin sur l’amélioration des résultats de la prise en charge du paludisme grave

Photo: Le Dr. Fayulu (à droite) et l’équipe du centre de Male discutent du cas d’un patient atteint de paludisme grave.

Le Dr. David Fayulu, de la République Démocratique du Congo (RDC), travaille comme médecin depuis 17 ans en RDC, au Zimbabwe, au Chad, en République Centrafricaine (RCA), au Malawi et maintenant en Zambie. Pendant toute sa carrière, il a lutté contre le paludisme qui reste une maladie courante et cependant mortelle, surtout en Zambie où il est basé aujourd’hui. Le mois dernier (décembre 2017) il a vu plus de 400 patients atteints de paludisme, dont 15 cas de paludisme grave. D’après son expérience, le paludisme est surtout problématique chez les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes.


Vous travaillez dans un hôpital de référence, mais de nombreux cas de paludisme grave surviennent dans des communautés isolées, souvent éloignées d’un hôpital. Comment peut-on aider ces communautés pour améliorer la prise en charge du paludisme grave et ses résultats ?

Il est important de former les agents de santé communautaires sur l’identification des symptômes du paludisme, afin qu’ils puissent former un lien entre l’hôpital et la communauté et prendre des mesures pour éviter que la maladie n’évolue vers un paludisme grave. Les communautés doivent aussi être sensibilisées sur les signes de danger du paludisme grave, afin qu’elles puissent agir dès que les symptômes apparaissent. Les mesures préventives, tels que les moustiquaires et les répulsifs anti-moustiques, sont également utiles.

Les enfants et les femmes enceintes sont plus sensibles au paludisme que les adultes et les enfants plus âgés. Comment peut-on mieux protéger ces populations ?

Il est important de traiter tous les cas de paludisme simple, et particulièrement ceux qui touchent ces groupes vulnérables, si possible avant qu’ils n’évoluent vers un paludisme grave. Assurer les vaccinations recommandées pour les enfants ainsi qu’une alimentation adéquate permet d’aider leur système immunitaire à mieux combattre les infections. Il est également important que les femmes enceintes se rendent aux consultations prénatales au cours desquelles un test diagnostique de paludisme sera effectué, et un Traitement Préventif Intermittent (TPI) du paludisme pour les femmes enceintes leur sera donné.

Comment le paludisme grave est-il pris en charge dans les pays où vous avez travaillé ?

L’artésunate est désormais le médicament de choix pour traiter le paludisme grave, à cause des effets secondaires indésirables du précédent traitement recommandé, la quinine. D’après mon expérience, peu d’effets secondaires ont été rapportés avec l’artésunate, qui est généralement bien toléré par les patients. Conformément aux directives nationales, la quinine est toujours utilisée, mais comme alternative thérapeutique, ou pendant le premier trimestre de la grossesse. Pendant les deuxième et troisième trimestres, l’artésunate est généralement utilisé.

L’OMS recommande généralement d’utiliser l’artésunate pour le traitement du paludisme grave pendant tous les trimestres de la grossesse. Pourquoi selon vous cette recommandation n’a-t-elle pas encore été adoptée par certains pays, et que faudrait-il faire pour augmenter cette pratique ?

L’adoption et l’utilisation de l’artésunate pendant le premier trimestre de la grossesse, conformément aux recommandations de l’OMS, est un sujet sensible parce qu’il concerne à la fois le fœtus et la mère. La décision finale dépend de l’expérience propre de chaque pays avec le médicament, des études menées sur leur territoire, du rapport bénéfices/risques pour la mère et le fœtus, et de la décision du prestataire médical et de celle de la mère. Même si aucune étude ni aucune publication n’ont mis en évidence un quelconque risque lié à l’utilisation de ce médicament pour le fœtus ou la mère, chaque pays émet ses propres directives.

Qu’attend-on des différents niveaux du système de santé pour que le paludisme grave soit pris en charge correctement ?

PNLP et Ministère de la santé :

  • Communiquer au personnel hospitalier les dernières directives thérapeutiques nationales pour le paludisme.
  • Leur donner la formation nécessaire pour exécuter les recommandations sur la prise en charge des cas.
  • Assurer de bonnes conditions de travail sécurisées avec le matériel nécessaire pour la prise en charge des cas, tel que des seringues, des kits de TDR, des médicaments, des solutés, des canules, etc.


Organisations internationales :

  • Collaborer avec les efforts locaux pour amener des soins médicaux aux communautés.
  • Engager des discussions avec le Gouvernement local pour améliorer la prise en charge médicale et les aider à atteindre les objectifs fixés afin d’améliorer la santé dans la communauté.
  • Participer au renforcement des capacités locales en réalisant des formations et des ateliers.