Cameroun

Données factuelles concernant le paludisme

Le paludisme est la maladie endémique la plus répandue au Cameroun. Cette maladie est essentiellement due au parasite Plasmodium falciparum ; le moustique Anopheles gambiae s.l. en est le principal vecteur de transmission.[1] Le gouvernement camerounais a fait de la lutte contre le paludisme une priorité, notamment dans sa Stratégie nationale pour le secteur de la santé, ainsi qu’à travers l’adoption de l’exercice de stratification « High Burden to High Impact » (D’une charge élevée à un fort impact) dans le Plan stratégique national de lutte contre le paludisme. [2] L’actuel Plan stratégique national (PSN) du Cameroun pour la lutte antipaludique couvre la période 2019-2023 et constitue la cinquième version d’une stratégie nationale.

Le Cameroun fait partie des quinze pays les plus touchés par le paludisme, avec 2,9 % de tous les cas de paludisme et de décès dans le monde et 2,4 % des décès dus au paludisme en 2020 [1] ; cela en fait le troisième pays le plus touché d’Afrique centrale (12,6 % des cas en 2020). Les cas suspects de paludisme ont constitué 30 % des consultations médicales et 21 % des visites dans des établissements de santé ont donné lieu à un diagnostic de paludisme confirmé en laboratoire.[1] D’après les statistiques nationales de 2015, 19 % des décès en établissement de santé étaient imputables au paludisme et 48 % de toutes les admissions à l’hôpital étaient dues à une suspicion de paludisme grave.[1]

Entre 2017 et 2020, le nombre de cas a augmenté de 3,8 %, passant de 250 à 260 pour 1 000 habitants à risque.[2] Durant la même période, le taux de mortalité a légèrement augmenté de 0,8 %, passant de 0,55 à 0,56 pour 1 000 habitants à risque.[1] Moins de 30 % des enfants qui présentaient de la fièvre ont eu un test de dépistage du paludisme.[2]

Dans le cadre de l’approche « High Burden to High Impact » (HBHI), une stratification du risque de paludisme a été définie en combinant les taux de prévalence, d’incidence et de mortalité toutes causes confondues. Sur la base de ce critère, les 189 districts sanitaires du pays sont classés en : (i) risque très élevé (21 %) ; ii) risque élevé (31 %) ; iii) risque moyen (27 %) ; et iv) risque faible (21 %). Les districts sanitaires à très haut risque et à haut risque sont répartis dans presque toutes les régions du pays, mais avec une forte concentration dans les régions de l’Est, de l’Adamaoua, du Centre et du Sud. Les districts à risque moyen et faible sont concentrés dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et de l’Ouest. [5]

Le Cameroun est en train de mettre en place les conditions préalables au lancement de la Couverture santé universelle (CSU). [5] Son objectif est de consolider les différents traitements/soins gratuits et subventionnés mis en œuvre dans le pays. La façon dont le paludisme sera intégré à la Phase 1 n’a pas encore été précisée, mais le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP) est impliqué dans le processus d’élaboration de la CSU. Les partenaires de la lutte contre le paludisme espèrent que la CSU améliorera l’accès des services de prise en charge du paludisme et leur qualité pour la population camerounaise.[1]

Moustiquaires imprégnées d’insecticide

Entre 2011 et 2018, la proportion de la population ayant accès à une moustiquaire imprégnée d’insecticide est passée de 21 % à 59 %. Au cours de la même période, l’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticide par les enfants et les femmes enceintes a augmenté de manière similaire, passant de 21 % en 2011 à 60 % en 2018. Les régions de l’Extrême-Nord et du Nord du pays ont tendance à afficher la plus forte utilisation de telles moustiquaires.

Le paludisme chez l’enfant en bas âge

Entre 2015 et 2018, l’incidence chez les enfants de moins de cinq ans est passée de 188 à 218 cas pour 1 000 enfants, et le taux de mortalité de 66,6 à 77,6 décès pour 100 000 enfants. L’augmentation de l’incidence peut être liée à la fois au dépistage systématique du paludisme chez les femmes enceintes lors de consultations prénatales, contrairement aux directives nationales, et à des insuffisances dans la prévention. L’augmentation du taux de mortalité chez les enfants de moins de cinq ans est liée à des difficultés de prise en charge des cas, en particulier un accès tardif aux soins et des ruptures de stock prolongées de médicaments (artésunate injectable) pendant la saison de forte transmission.

Prise en charge des cas

La stratégie du Cameroun pour la prise en charge des cas pour la période 2019-2023 prévoit les initiatives suivantes : [1]

  • Intensification des formations/remises à niveau pour le personnel de santé sur les directives nationales relatives à la prise en charge des cas ;
  • Sensibilisation des acteurs du secteur public et privé aux directives nationales ;
  • Extension de la prise en charge intégrée des cas au niveau communautaire (iCCM) à tous les districts de santé (avec 22 000 agents de santé communautaire dans 109 districts actuellement non couverts) pour assurer une bonne couverture géographique de la population ;
  • Mise en œuvre du contrôle de la qualité des produits médicaux.

Des évaluations de référence des pratiques de prise en charge des cas ont été réalisées dans 135 établissements de santé dans 13 districts du Nord et de l’Extrême-Nord en septembre 2019. Elles ont abouti entre autres aux conclusions suivantes : [1]

  • 70 % des établissements ont effectué des tests de diagnostic (TDR ou microscopie) avant de fournir un traitement contre le paludisme ;
  • 53 % des prestataires de santé n’avaient reçu aucune formation sur la prise en charge des cas de paludisme ;
  • 81 % des cas de paludisme grave confirmés ont été traités par artésunate injectable, artéméther intramusculaire ou quinine injectable. Tous les cas de paludisme chez les femmes enceintes ont été considérés comme graves et traités en conséquence ;
  • La prise en charge des cas de paludisme simple et grave chez les enfants de moins de cinq ans était gratuite dans seulement 39 % des établissements de santé.

Le PNLP a mené une étude sur la politique de diagnostic et de traitement gratuits du paludisme simple et grave au Cameroun de juillet à août 2018 [2]. Elle a permis d’établir les constats suivants :

  • Les directives nationales relatives au traitement de la maladie ont été respectées dans seulement 39 % des cas de paludisme grave ;
  • Il y a eu de façon manifeste une large surutilisation des traitements réservés au paludisme grave pour des cas de paludisme simple ;
  • La quinine intraveineuse était un traitement courant pour traiter les cas de paludisme grave.

Prise en charge des cas de paludisme grave chez la femme enceinte

Le Plan stratégique national de lutte contre le paludisme pour la période 2014-2018 préconise de traiter tous les cas de paludisme chez la femme enceinte comme des cas de paludisme grave, ce qui ne correspond pas aux recommandations de l’OMS. [1] Durant le premier trimestre de grossesse, de la quinine doit être administrée par voie intraveineuse durant les 24 premières heures, suivie de quinine prise par voie orale pendant une durée maximale de sept jours. À partir du second trimestre, le traitement de première intention est l’artésunate injectable ; le traitement recommandé en seconde intention est la quinine injectable ou l’artéméther intramusculaire. [1] Ce traitement n’est pas gratuit, mais il est subventionné. Cela constitue un obstacle pour de nombreuses femmes enceintes ayant besoin d’un traitement contre le paludisme.

Prévention du paludisme pendant la grossesse

Le TPIg avec sulfadoxine-pyriméthamine (SP) administré lors des consultations prénatales a été adopté en 2007. La politique a été revue en 2012 afin d’augmenter le nombre de doses de SP administrées pendant la grossesse et passer d’au moins deux doses au total à au moins trois doses au total, une dose à chaque consultation prénatale à partir de seize semaines, puis chaque mois jusqu’à la naissance. La politique a été à nouveau revue en 2020 pour commencer le SP plus tôt, à treize semaines, et poursuivre ce traitement à chaque consultation prénatale mensuelle. [2]

En 2018, 54 % des femmes enceintes avaient reçu au moins deux doses du traitement préventif intermittent (TPIg2), soit un taux similaire à celui de 2014 (53 %). La proportion de femmes enceintes ayant reçu au moins trois doses (TPIg3) est passée de 26 % en 2014 à 32 % en 2018. [1]

La faible couverture du TPIg (et le fait que cette intervention ne soit pas intégrée aux soins prénatals) s’expliquait par les éléments suivants : [1]

  • fréquentes ruptures de stock au niveau des établissements de santé en raison de retards dans les achats et de problèmes dans la gestion des stocks ;
  • non-respect par le personnel de santé ;
  • mauvaise gestion des services de soins prénatals dans les établissements de santé ;
  • administration tardive des soins prénatals chez les femmes enceintes (jusqu’à sept mois) ;
  • obstacles financiers, alors que la sulfadoxine-pyriméthamine (SP), utilisée pour le TPI, est censée être administrée gratuitement.

Chimioprévention du paludisme saisonnier

Le Cameroun a introduit la CPS en 2016 sous forme de sulfadoxine-pyriméthamine et d’amodiaquine (SPAQ) administrée à environ 1,1 million d’enfants éligibles (de 3 à 59 mois) habitant dans les 45 districts de santé des régions du Nord et de l’Extrême-Nord, soit une couverture de 86 %. [1]

En 2017, quatre cycles de SPAQ (SP + amodiaquine), la combinaison d'antipaludiques utilisée pour la CPS, ont été administrés à 1,5 million d’enfants âgés de 3 à 59 mois (soit 94,5 % des enfants de ce groupe d’âge).[2] Environ 3,5 millions d’enfants ont bénéficié d’une CPS en 2018. [1]

Les données préliminaires des deux premiers cycles de la CPS (2017) dans le nord du pays indiquaient que la CPS a contribué à prévenir l’apparition du paludisme chez plus de 95 % des enfants âgés de 3 à 59 mois.[1]

Compte tenu des programmes de CPS dans le nord du pays, la CTA de première intention pour cette région du pays a été remplacée par l’artéméther-luméfantrine (AL) plutôt que par l’artésunate-amodiaquine (ASAQ) pour atténuer la résistance potentielle à l’amodiaquine. Les huit autres régions maintiendront l’ASAQ comme traitement de première intention.[1]

Populations vulnérables

Les populations vulnérables comme les personnes déplacées, les nomades, les orphelins, les prisonniers et les réfugiés continuent d’avoir un accès limité aux services de soins antipaludiques. En outre, les données sont de qualité médiocre et les prestataires de soins du secteur privé sont mal intégrés.[1]

Politiques et pratiques liées au paludisme grave

Directives thérapeutiques nationales
Recommandations Traitements
Forte Artésunate injectable
Alternative Quinine injectable
Alternative Artéméther injectable
Recommandations Pré-transfert
Forte Artésunate IV (première dose)
Alternative Artésunate IM
Alternative Quinine IM
Alternative Artéméther IM
Premier trimestre de la grossesse
Recommandation Traitements
Forte Quinine IV

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